James Pantemis, la voix d’un vestiaire en mission

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James Pantemis MLS

Le Stade Saputo vibrait encore vendredi soir. Une qualification pour les séries, des tribunes en fusion, des chants qui résonnent jusque dans les ruelles du Plateau. Au cœur de cette euphorie, un homme incarne la résilience et l’apaisement : James Pantemis. Le gardien du CF Montréal, longtemps en quête de sa place, est revenu au premier plan. Avec lui, c’est tout un vestiaire qui croit désormais en sa force collective.

« Beaucoup d’adrénaline, beaucoup de choses dans ma tête… mais là j’ai enfin bien dormi », confie Pantemis, quelques jours après la victoire décisive. Son sourire trahit un mélange de soulagement et de détermination. L’objectif est clair : sécuriser un Top 3 pour accueillir les play-offs à domicile. « La moitié du travail est faite. Le vrai défi commence maintenant. »

Une ambiance de feu

Vendredi, le stade a basculé. Pantemis raconte l’impact des tribunes sur les joueurs :
« C’était parmi les trois meilleures ambiances que j’ai connues. Quand les 132 et 1642 se répondent, c’est dur pour l’adversaire. Dès notre premier but, j’ai eu des frissons. Pendant sept minutes, tout le stade était debout. C’était incroyable. »

Pour un gardien, souvent isolé, ces vibrations deviennent un carburant. « Parfois je sens les adversaires déstabilisés. Ils n’entendent même plus leurs propres consignes. Ça, c’est la force du public. »

Le poste le plus cruel du foot

Si Pantemis savoure son retour comme numéro 1, il n’oublie pas la dureté de son rôle. « On peut faire 89 minutes parfaites… puis une erreur à la 90e et tout le monde ne retient que ça. »
La rotation décidée par l’entraîneur entre lui et Sébastien Breza a été déroutante pour les observateurs. Pour Pantemis, c’est une leçon d’humilité. « J’ai pris cette saison comme une opportunité. J’ai travaillé en salle pour renforcer mes épaules, sur le terrain pour améliorer mon jeu au pied. J’ai cherché ce petit feu intérieur qui me pousse à être prêt quand l’occasion se présente. »

Il insiste sur la solidarité entre gardiens. « On se parle, on s’analyse, on rigole. À la fin, peu importe qui joue, on sait qu’on peut aider l’équipe. Cette relation est précieuse. »

Progression et maturité

En deux ans, Pantemis dit avoir franchi un cap. Son jeu au pied, plus serein, en témoigne. « Avant, je cherchais toujours la passe courte. Maintenant, si je sens le danger, je dégage. Je préfère perdre la balle à 40 mètres que devant ma boîte. »
L’analyse vidéo occupe aussi une place centrale. « On filme tout : matches et entraînements. Chaque décision est disséquée. C’est exigeant, mais ça forge des automatismes. »

Cette rigueur a changé son rapport à la pression. « J’ai appris à transformer mes erreurs en apprentissages. Désormais, je prends mes décisions plus vite. »

Des défis collectifs

Pour le CF Montréal, la fin de saison n’a rien d’un long fleuve tranquille. Les derniers matches à domicile ont soulevé des inquiétudes. « On a concédé trop de premiers buts. Ça nous met tout de suite en difficulté. On doit retrouver l’intensité de début de saison où on marquait dès les premières minutes. »
Pantemis reste optimiste. « Même menés, on trouve toujours le moyen de revenir. Ça prouve notre résilience. »

Le vestiaire, lui, respire la camaraderie. « On est tous amis. Dans les petits jeux à l’entraînement, ça se chamaille, mais toujours dans l’esprit de compétition. Il n’y a pas d’ego au-dessus de l’équipe. »

L’œil du gardien sur le jeu

Pantemis parle aussi avec passion de son rôle tactique. Sur un corner, doit-il boxer ou capter ? « Idéalement, j’attrape. Ça calme l’équipe et on peut relancer. Mais quand ils mettent cinq ou six joueurs dans la boîte, parfois il vaut mieux boxer. »
Même regard acéré lorsqu’il revient sur une analyse de but contre Columbus. « Je m’attendais à une frappe sur mon côté droit. Le ballon a été contré et m’a pris à contre-pied. Frustrant, mais c’est la réalité de notre poste. Tu dois accepter l’injustice, puis repartir. »

Une mission plus grande que lui

Au fil de l’entrevue, une idée revient : Pantemis ne joue pas seulement pour lui. Il joue pour une équipe, une ville, un public. « Ce que je retiens, c’est cette énergie partagée. Quand Saputo explose, tu sens qu’on vit quelque chose d’unique. »

Au-delà du terrain, sa trajectoire illustre une réalité du sport québécois : les carrières sont faites d’attentes, de doutes, de retours. La patience, l’investissement invisible, les discussions d’ego étouffées au nom du collectif.

Le football comme miroir social

À travers Pantemis, c’est tout un symbole qui se dessine. Celui d’une jeunesse québécoise qui doit sans cesse prouver sa valeur, dans une ligue où rien n’est acquis. Celui d’une ville où la ferveur populaire n’a pas encore la reconnaissance médiatique des grands marchés, mais qui se construit match après match.

Les play-offs approchent, et Montréal retient son souffle. Le gardien en est conscient : « Ce n’est qu’un début. Les séries, c’est une autre saison. »

Quoi qu’il arrive, James Pantemis aura marqué un jalon. Celui d’un joueur qui transforme la pression en moteur, et qui rappelle qu’au Québec, le soccer n’est plus une simple distraction. C’est une affaire d’identité, de communauté, et de fierté.