Medjdi Sahraoui JMDIX, pour développer l’élite du football québecois

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JMdix foot Pro

La veille de la Saint-Jean, la chaleur plombe Montréal. Au CAN Football Club, l’air est dense mais les idées sont nettes. Invité du soir : Medjdi “MJD” Sahraoui, chargé du programme à JMDIX Foot Pro. Né en 2018 « au nom de [son] fils », le projet veut hausser le plafond de verre du soccer québécois.
« On veut changer la mentalité. On ne part pas avec le parent qui paye, on part avec le talent. »

Canadian Football Talents : une méritocratie assumée

D’abord, Canadian Football Talents sert de bras armé : sélection méritocratique des meilleurs U9–U12, Sunday Matches compétitifs (8v8, 9v9), et surclassement volontaire — « les 2015 contre les 2014 ». Ensuite, cap sur l’Europe : trois tournois (deux en France, un en Catalogne), frais couverts par des commandites, grâce à un comité de parents mobilisé.
« On rassemble les meilleurs à chaque poste. Pas cinq bons et cinq moyens. On crée une synergie. »

Une méthode structurée, inspirée de l’Europe

Concrètement, le staff s’appuie sur une grille d’évaluation, des cellules de prospection dans clubs et académies, et un encadrement élargi (coach principal, adjoint, responsable des gardiens). Par ailleurs, l’Europe sert de boussole. « À l’Ajax, c’est cinq séances par semaine, 2 h 15, plus des matchs de qualité. »
Ainsi, l’objectif local devient clair : vitesse de jeu, lecture, 1–2 touches, cognition. « On travaille le cognitif. »

Les parents au centre, pas au-dessus

Cependant, un point sensible traverse la discussion : le rôle des parents. « Le parent est central. Mais la multi-pratique peut nuire. Football américain et soccer en même temps, à 13 ans, ça finit en blessures. »
Plutôt que la dispersion, Sahraoui défend l’engagement et la stabilité. Autre filtre : l’attitude. « Je ne veux pas d’un joueur qui crie après un coéquipier. Je veux un enfant serein, qui perd le ballon et revient à fond pour le récupérer. »
Bref, du talent collectif avant tout.

Ce que le Québec peut ajuster

Pourtant, il ne sermonne pas ; il propose. Premièrement, revoir les Centres de développement de club : plus d’éducateurs qualifiés, moins d’ateliers « robotiques ». Deuxièmement, catégoriser par niveaux afin d’optimiser l’apprentissage. Troisièmement, animer les séances pour stimuler la prise d’information.
« Les académies ne remplacent pas les clubs, elles complètent. Mais si la base technique et la pédagogie déraillent au départ, on construit sur du sable. »

Ambition sportive : viser haut, préparer fin

Ensuite vient l’ambition, dite sans détour : gagner. « Je veux aller pour remporter le tournoi. » Répété deux fois, sans emphase. Non pour cocher une case touristique : pour crédibiliser l’idée qu’au Québec, la densité de talents existe déjà.
De plus, l’équipe veut ouvrir des portes. « Il y a des règles FIFA, oui. Mais si on prépare bien nos jeunes, les opportunités suivront : essais, réseaux, États-Unis, Europe. La réputation est en jeu. J’amène seulement des enfants prêts. »

Une histoire de famille… et d’écosystème

À ce moment, le récit se fait intime. Pourquoi “JMDIX” ? « Pour mon fils. ‘J’ est la première lettre, ‘M’ la dernière. » Le 10 de cœur ? « Zidane. » Moment de carrière le plus fort ? « La naissance de mon fils. »
Par ailleurs, le projet vit au-delà du terrain : remerciements à Marché Castel et Restaurant Cosmopolitain Vio. Preuve qu’un écosystème local peut devenir un véritable accélérateur de destin.

Processus avant résultat… mais résultat quand même

En attendant la première feuille de match européenne, la discipline quotidienne reste la clé : prospection, sélection, confrontation ciblée, habitudes de jeu rapide et réfléchi. Même si la victoire n’arrive pas tout de suite, le processus laissera une empreinte : meilleure qualité technique, meilleurs réflexes cognitifs, meilleure culture de l’effort.
Ainsi, l’enjeu dépasse le tableau d’affichage : il s’agit d’installer des habitudes durables.

L’ouverture sociétale : l’égalité d’accès

Néanmoins, une question s’impose : comment garantir l’égalité d’accès ? La ligne « le talent avant le chèque » est forte. Encore faut-il la scaler.
Concrètement, cela suppose : des commandites récurrentes pour couvrir les coûts lourds, une montée en compétence des éducateurs de base, un maillage avec les clubs pour diffuser l’approche cognitive dès l’initiation, et une transparence sur la sélection afin d’éviter les angles morts.
Autrement dit, méritocratie et inclusion doivent marcher ensemble.

Une province qui y croit

Finalement, tout se résume à une scène simple : une soirée de juin, un studio, un père qui dit « on va y aller pour gagner », et une communauté qui répond : on y croit. D’ici là, des dimanches surclassés, des séances animées, des éducateurs valorisés.
Si le Québec s’habitue à penser vite, jouer juste, et exiger mieux, le plafond monte. Et quand la fenêtre européenne s’ouvrira, il faudra être prêt à passer.